samedi 29 décembre 2012

Le Divin Enfant


Il me revient que l'autre soir, à la messe "de minuit" (moins une couple d'heures), on nous a fait chanter quelques grands classiques dont les incontournables "Anges dans nos Campagnes", pour conclure en clamant qu' "Il est né le Divin Enfant" (mais désormais, hélas !,  sans les hautbois et les musettes de jadis...)
Quelque part entre ces deux-là nous pénétrâmes, guidés par l'accordéon à pédales devenu électronique, "Dans une étable obscure". Nous eûmes donc droit à "la totale", ce qui, tout compte fait, ne m'était pas désagréable, me faisant retourner, une fois de plus, à ces Noëls dans la neige, en Valromey (Haut-Bugey). Mais là, dans cette "étable obscure", au 3° couplet, mon filet de voix fut bloqué net. N'allais-je pas chanter que le tout p'tiot gamin de Palestine, ce pur sémite qui pleurait en araméen pour avoir le sein de sa petite brunette de jeune maman, était en réalité un bambin blondinet ? Jugez-en :

Plein d'une foi profonde,
Le monde est à genoux !
Frêle Majesté BLONDE
Etends les mains sur nous !


Ma foi! ma foi ne va pas jusque là ! Comme me l’a dit un ami: "Quand  il entend ça, s'il y était encore il s'en retournerait dans sa tombe. Heureusement qu'il est ressuscité !"
Ah, ça, oui ça, c'est bien vrai ! Heureusement qu'il est ressuscité !
N'empêche, qu'est-ce qu'on lui colle sur le dos... et que de c...âneries n'a-t-on pas proférées en son nom...
Sans compter que, chanter ça, c'est un coup à se faire accuser de manipulation, d'instrumentalisation raciste  !...

Bon, pour me faire pardonner ce que d'aucuns ne manqueront pas de qualifier d'insolence, d'iconoclasme, que sais-je, de blasphème, je laisserai la parole à son Père, qui va nous dire, en confidence, ce qu'il pense d'une toute petite fille de rien du tout, sa préférée, née, elle aussi le jour de Noël, "avec" le bébé - brun à coup sûr - dont on vient de parler, et même, grâce à lui.

La foi que j'aime le mieux, dit Dieu, c'est l'espérance.
La Foi ça ne m’étonne pas.
Ça n’est pas étonnant...
J’éclate tellement dans ma création....
La Charité, dit Dieu, ça ne m’étonne pas. Ça n’est pas étonnant.
Ces pauvres créatures sont si malheureuses qu’à moins d’avoir un cœur de pierre,
comment n’auraient-elles point charité les unes des autres...
Ce qui m’étonne, dit Dieu, c’est l’ Espérance.
Et je n’en reviens pas.
L’ Espérance est une toute petite fille de rien du tout.
Qui est venue au monde le jour de Noël de l’année dernière.
C’est cette petite fille de rien du tout.
Elle seule, portant les autres, qui traversa les mondes révolus.
La Foi va de soi.
La Charité va malheureusement de soi.
Mais l’ Espérance ne va pas de soi. L’ Espérance ne va pas toute seule.
Pour espérer, mon enfant, il faut être bienheureux, il faut avoir obtenu,
reçu une grande grâce.
La Foi voit ce qui est.
La Charité aime ce qui est.
L’ Espérance voit ce qui n’est pas encore et qui sera.
Elle aime ce qui n’est pas encore et qui sera.
Sur le chemin montant, sablonneux, malaisé.
Sur la route montante.
Traînée, pendue aux bras de des grandes sœurs,
qui la tiennent par la main,
La petite espérance s’avance.
Et au milieu de ses deux grandes sœurs elle a l’air de se laisser traîner.
Comme une enfant qui n’aurait pas la force de marcher.
Et qu’on traînerait sur cette route malgré elle.
Et en réalité c’est elle qui fait marcher les deux autres.
Et qui les traîne, et qui fait marcher le monde.
Et qui le traîne.
Car on ne travaille jamais que pour les enfants.
Et les deux grandes ne marchent que pour la petite.

                 Charles Péguy - Extraits de : Le porche du mystère de la deuxième vertu.

Et, avec elle, avec cette petite fille de rien du tout, grâce à elle, Bonne Année 2013 !
Bernard Maréchal


mercredi 26 décembre 2012

Passons à une foi adulte.


Enfant, je croyais aux cadeaux de Noël apportés miraculeusement par le Père, le Père Noël bien sûr. Puis je n’ai  plus cru au mystérieux arrivage mais j’ai remercié tout autant mes parents de leur amour pour moi et mon « merci » a été un amour plus profond pour eux.
Chrétien grandissant, je n’ai plus « foi » au « mystère » de Noël, et je le mets au niveau du compréhensible, je l’humanise. Et alors, je découvre l’essentiel. Celui que j’appelle Dieu, aime ; aime le Monde et chaque être, il m’aime Moi. Pour me le dire il a envoyé un enfant né sur terre comme moi, d’une mère comme la mienne. Cet enfant, plus éclairé que moi, me dit : « Dieu est Père, Papa « Abba ». J’ai compris son amour, comprends le à ton tour »
C’est là tout le Mystère de Noël.
Je ne suis plus larmoyant devant la crèche, je suis émerveillé devant ce petit qui, dans ses vagissements me dit : « Notre Père nous aime et nous supplie d’aimer. » Message qu’il dira à la fin de sa vie en Jean 13/34.
Gilles.

mercredi 19 décembre 2012

Manifeste pour une Église dans le monde de ce temps



Nos amis québécois du « Forum André Naud » proposent leur
Manifeste pour une Église dans le monde de ce temps,
 inspiré par celui des 300 prêtres autrichiens et adopté lors de leur Assemblée Générale d’Octobre 2012. Ce Manifeste contient quatre souhaits, sept engagements et un grand désir :


« Nous demandons aux premiers responsables de l’Église catholique, dont nous sommes aussi membres par notre baptême, de s’atteler à une urgente et nécessaire reforme ecclésiale qui permettrait aux disciples du Christ de collaborer à l’instauration d’une fraternité universelle dont l’Homme de Nazareth avait fait sa grande préoccupation. Lors de son dernier repas avec les siens, quel message il nous a laissé avec le tablier, le pain et le vin! Par fidélité au Christ, à l’Évangile et à l’institution qui tente de le manifester AUJOURD’HUI, nous nous sentons obligés de déclarer à nouveau nos options et nos choix. : n’est-ce pas une loi de la vie que de recommencer?

Nous souhaitons que :

-       Dans l’Église l’autonomie de l’être humain et l’importance de sa conscience soient au centre de nos orientations et de nos décisions d’agir, une conscience de disciple « qui repousse vigoureusement tout juridisme étroit et mesquin qui perdrait de vue le primat de l’amour généreux sur les règles concrètes d’action.[1]» Le Christ ne donne pas un long code de conduite, mais beaucoup d’exemples d’humanité.

-    L’égalité femme/homme reconnue dans la société civile le soit autant dans notre Institution ecclésiale.

-     La décentralisation de l’Institution ecclésiale (avec les siècles devenue romaine et gérée par la Curie) se traduise progressivement par une prise en charge de chaque communauté chrétienne par ses membres, selon leurs talents et leur disponibilité.

-          Nos évêques prennent une plus grande liberté face au gouvernement central de notre Institution et une plus grande implication, associés aux laïques, dans les enjeux de notre société québécoise. « Dans l’état actuel des choses et de la législation de l’Église, le pape et les évêques ont le devoir d’être prêts à reconsidérer les règles qui concernent la « juste » liberté  de pensée et d’expression dans l’Église.[2] »

Conséquemment
Nous nous engageons à :

 -            Promouvoir partout et en tout temps l’importance de la conscience éclairée de disciple, de l’égalité  femme/homme, de la décentralisation dans notre Institution ecclésiale, et de la liberté de pensée et   d’expression dans notre Église.

-    Intervenir sur le terrain pour favoriser l’existence de communautés chrétiennes à taille humaine capables, dans un climat de coresponsabilité, de répondre à leurs propres besoins  même dans un contexte de fusion de paroisses (distribution des tâches pastorales, reconnaissance de  ministères propres à une communauté, consultation pour le choix du pasteur, célébration de la Parole avec communion, célébration conjugale,…). La liberté d’action évangélisatrice des  communautés chrétiennes repose sur la connaissance des personnes, de leurs besoins, de leurs  aspirations, de leurs joies et de leurs peines.

-      Accueillir ouvertement dans leurs différentes situations de couples les personnes séparées réengagées, les personnes homosexuelles, les personnes vivant en union de fait,… qui cheminent dans la communion au Christ à la table eucharistique.

-              Promouvoir la célébration du pardon de Dieu avec absolution collective.

-              Inviter des laïques formés de nos communautés à prononcer une homélie.

-              Promouvoir la réinsertion dans l’exercice du ministère presbytéral des prêtres qui ont quitté le ministère et qui pourraient aujourd’hui être mariés.

-              Nous exprimer en faveur de l’ordination diaconale des femmes, ainsi que de l’ordination presbytérale de femmes et d’hommes mariés ou célibataires

Nous désirons poursuivre ce dialogue déjà amorcé avec l’ensemble du Peuple de Dieu et nous invitons nos évêques à se joindre à cette démarche.


                                                                                                              Reproduit avec l’accord du "Forum-André-Naud"
1. NAUD, André, Le magistère incertain, Fides 1987, p. 250.
2. NAUD, André, Pour une éthique de la parole épiscopale, Fides 2002, p. 24.

mercredi 12 décembre 2012

Homosexualité: des réflexions à faire mûrir




Lorsqu’il s’est présenté pour l’élection présidentielle, François Hollande a proposé aux Français 60 engagements, 60 propositions.

Sa proposition 31: « J’ouvrirai le droit au mariage et à l’adoption aux couples homosexuels » se place entre le délit de faciès et le handicap.
Pourquoi l’urgence de la proposition 31 plutôt  que de la 30 ou de la 32 qui sont bien plus prégnantes d’urgence tant elles concernent de monde ?

L’homosexualité est restée trop longtemps une charge insupportable aux intéressés, particulièrement dans les entreprises. Des personnes homosexuelles ont décidé depuis des années de mettre ce problème au jour. Elles ont d’abord voulu le tirer au clair pour elles-mêmes. Combien d’homosexuels en psychanalyse ? !
Elles ont voulu faire profiter d’autres de leurs découvertes, de leur retour à la vie peut-on dire, et se sont organisées en « mouvement ». Mouvement minoritaire : il se défend  se fait entendre d’autant plus fort.
Reste maintenant à ce qu’il mûrisse.
Le premier point : mariage, semble reconnu même dans l’Eglise. Des prêtres disent même que puisque « tout amour vient de Dieu », disons de l’amour homo qu’il est bon et bien, bien dit, bene dictus, béni, donc bénit de Dieu et normalement de son Eglise
Demeure l’épine du mot mariage lui-même. D’autres langues s’essaient à trouver un autre terme.
Reste l’adoption : avoir un enfant, est-ce pour lui d’abord ou est-ce pour soi ? De quoi, de qui a-t-il besoin pour s’épanouir ?
Notre société se tourne vers la psychanalyse, vers ces gens qui, étant allés les premiers aux fondations d’eux-mêmes, peuvent dire quelque chose sur les découvertes de ce voyage pour que d’autres en profitent.
Leurs découvertes ne sont pas toutes identiques vu la diversité des personnes. L’intérêt c’est qu’ils en parlent entre eux, beaucoup actuellement, et sans exclusive. Ainsi les choses mûrissent.
Ne serait-ce pas le chemin à suivre pour les politiques et aussi pour les religieux ?
Dans les journaux les points de vue s’échangent depuis un certain temps. Les évolutions sont manifestes ; on trouve encore des raideurs…
Les évêques qui naguère ramaient vent debout contre le Téléthon le font actuellement contre l’homosexualité, mais on constate que leurs avis sur les objectifs du Téléthon ont évolué. De quoi la « grâce » n’est-elle pas capable !
Les manifestations sont utiles pour vider les agressivités, comme un grand coup de gueule, mais il faut revenir, calmés, à la discussion.
Patience, ça mûrit !
Monsieur Hollande, n’oubliez pas la proposition 30 ni la 32 ; entre elles deux la 31 mûrira.
Gilles Lacroix, prêtre, psychanalyste. Mont près Chambord 08.12.2012.

dimanche 2 décembre 2012

Le billet de Gilles


Dans les années 50, j’enseignais le catéchisme à un groupe de 80 et quelques filles sur ma paroisse, à Paris…Elles ont grandi depuis, et même depuis, se sont courbées : elle sont pour certaines grand’mères.
J’avais semé alors la loi de l' Evangile : aime ton prochain…
Tant d’années après, l’une d’elles me dit au téléphone : « Je suis maire adjointe de ma ville, responsable de la Culture. Je fais découvrir aux gens de la commune et d’ailleurs les beautés de la peinture par des conférences, des visites de musées, et d’autres choses… »
Elle aide des personnes à s’épanouir. Elle me dit au téléphone : « C’est beau de voir des gens s’ouvrir à de belles choses, d’échanger avec d’autres, de s’apporter des points de vue différents, de s’enrichir mutuellement ». Et je me dis : elle leur apprend de quelque manière ce qu'est « aimer son prochain ».
Le grain semé en terre a porté du fruit, 60 ans plus tard ; avant aussi sans doute, et après encore !
Oh, « geste auguste du semeur » !
Gilles -2/12/2012.