Extraits
Je
souhaite formuler dans la note que voici quelques attentes
personnelles. Je les exprime en mon propre nom propre. Je les exprime, en outre, comme un évêque
d’Europe occidentale, dans la conscience que des évêques d’autres régions
d’Europe ou d’autres continents peuvent avoir des opinions divergentes.
1. La
collégialité
Il
ressort d’ailleurs de l’Instrumentum
Laboris combien peuvent différer les réactions venues des divers continents
à propos du mariage et de la famille. Sur ce point, le document préparatoire
est honnête et transparent. L’Afrique et l’Asie ont de tout autres vues et
expériences que l’Europe et l’Amérique du Nord et même, entre l’Europe
Occidentale et Orientale, entre l’Europe du Nord et du Sud, des différences
importantes sont à remarquer. Cela n’a pas de sens de nier ou de négliger ces
différences. Elles ont vraiment une signification. Malgré la globalisation,
bien des développements et défis de ce monde connaissent des parcours décalés
dans le temps. Dans ces diverses ‘zones temporelles’, les évêques sont
responsables pour la part du peuple de Dieu qui leur est confiée. Ce n’est pas
une solution pour eux de dire que telles questions ne posent pas de problème,
ou justement en posent, mais à l’autre bout du monde. Une collégialité
monolithique a aussi peu d’avenir dans l’Eglise qu’une primauté monolithique.
J’espère que le Synode des évêques portera l’attention nécessaire à cette
diversité régionale. A propos de l’apport des conférences épiscopales à une
juste relation entre la primauté et la collégialité, le pape François écrit que
‘ce souhait ne s’est pas pleinement
réalisé’ et que ‘n’a pas encore été
suffisamment explicité un statut des conférences épiscopales qui les conçoive
comme sujets d’attributions concrètes, y compris une certaine autorité
doctrinale authentique. Une excessive centralisation, au lieu d’aider,
complique la vie de l’Eglise et sa dynamique missionnaire’. Peut-être le Synode pourra-t-il confier aux conférences épiscopales la
mission de se pencher l’année prochaine sur la problématique du mariage et de
la famille dans leur région, en vue de la deuxième session du Synode, en
octobre 2015.
2. La
conscience
Comme en d’autres pays, les évêques de Belgique se
sont retrouvés après la publication de l’encyclique Humanae Vitae devant une tâche difficile. Pendant le Concile Vatican
II, ils avaient travaillé intensément à la rédaction de la constitution Gaudium et Spes, en particulier au
chapitre Dignité du mariage et de la
famille. A la demande du pape Jean XXIII et du pape Paul VI, ils avaient été
activement concernés dans diverses commissions qui s’étaient penchées sur la
question de la paternité responsable et du contrôle des naissances. Ils avaient
longuement délibéré avec des théologiens moralistes, des scientifiques et des
mouvements de croyants laïcs. Leur opinion personnelle était connue de
l’opinion publique. Après la publication de l’encyclique, ils se trouvaient
devant un choix déchirant. D’un côté, ils voulaient comme évêques rester loyaux
à l'égard de la personne du pape Paul VI, avec lequel ils avaient collaboré si
intensément dans la confiance durant le Concile. D’un autre côté, comme évêques
diocésains, ils voulaient prendre leurs responsabilités envers la part du
peuple de Dieu qui leur était confiée, dans l’esprit et selon la mission
rappelée par le Concile. En effet, le Concile leur avait donné mission de prendre sur eux ‘les joies et les espoirs, les tristesses et
les angoisses des hommes de ce temps’ et de ‘scruter les signes des temps et de
les interpréter à la lumière de l’Evangile’. Ils voulaient exercer leur tâche de
pasteurs en tenant compte de cette nouvelle herméneutique ecclésiologique et
pastorale. Ils arrivaient ainsi plus vite que prévu à un conflit de loyauté et
donc à un cas de conscience. Comment pouvaient-ils rester unis au pape et en
même temps être fidèles au Concile ?