mercredi 23 octobre 2013

Du cauchemar à l’espoir



Il faudrait pourtant remettre l'Église à sa place, c'est-à-dire « en bas », avec un certain nombre de grandes réintégrations, une sorte de grands « pardons ». Demandons aux prêtres mis à l'écart de revenir, pour ceux qui le souhaitent. Rendons le droit de parler et d'écrire aux théologiens de la Libération. Ce ne sont pas la poignée d'intégristes qui ont besoin d'être réintégrés, mais les millions d'hommes et de femmes ayant des problèmes avec leur foi hésitante dans un contexte de modernité, avec leur vie intime remplie de problèmes dans les multiples questions séculières d'une société ou le « relativisme » est en fait la diversité infinie des situations et des cultures. Ce sont eux qui doivent se sentir à nouveau au cœur de la problématique de la foi et de l'Église.
Il est difficile de dire à leur place ce que pensent les prêtres de la génération conciliaire, atteignant nombreux les soixante-dix ans, ou plus âgés. Il est encore plus difficile de connaître les profondeurs des prêtres beaucoup plus jeunes qui avaient dix ans ou qui n'étaient pas nés à la date du Concile. Formés à une culture de reconquête et de restauration de la chrétienté, comment vont-ils se situer dans l'histoire du XXI' siècle ? Ils se sont emboîtés dans le célibat contraint. Dans l'obéissance, ils ont emboîté le pas d'une hiérarchie conservatrice. Comment vont-ils se situer face aux aspirations majoritaires des chrétiens, en France par exemple, à voir évoluer le statut du presbytérat ?
Pour la parole et l'écrit, ils sont sous la tutelle d'épiscopats largement rajeunis, que l'on va donc voir durer, sur un profil d'orientations conservatrices ou prêt à suivre Rome dans tous ses détours. Comme cela a toujours été, ces évêques appartiennent pour la plupart à cette catégorie d'ecclésiastiques entrés dans des séminaires bien choisis, avec la perspective de devenir évêques, ressentie dès leur plus jeune âge. Fils de familles favorisées ou porteuses de particules, ils ont « fait » les Carmes ou le séminaire français de Rome. Ils ne sont pas venus pour tenir des paroisses au-delà de l'indispensable début de carrière, parcourant ensuite les étapes graduées vers de plus hautes responsabilités. Une fois parvenus dans les postes de l'église « d'en haut », ils sont bien obligés de se montrer « dans la ligne ».
Cette hiérarchie acceptera-t-elle de réintégrer les prêtres exclus, de redonner l'Église aux laïcs ? Tous les clochers désaffectés d'Europe pourraient être confiés à des gens vivant à leur ombre, appelés à un nouveau presbytérat. Imaginons des collèges de cinq, dix ou vingt personnes des deux sexes, représentatifs de toutes les diversités des communautés, assumant les offices et les tâches à tour de rôle, sans exclusion du droit de parole. C'est d'ailleurs déjà ce qui se fait en partie, à la demande d'un clergé décimé. Cinq cents paroisses d'un département, conduites par dix ou vingt laïcs assumant les fonctions à temps partiel et à durée déterminée, ce seraient cinq ou dix mille responsables d'un genre nouveau susceptibles de remplir à nouveau tous les séminaires de France qu'il faudrait alors racheter aux promoteurs immobiliers auxquels ils ont été vendus.
Extrait du livre de Bruno Guérard« 50 ans de crise qui ont redimensionné Dieu et l’homme »




[1] Ed. Golias2010, pp. 290-291

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